Des entreprises pionnières ont instauré une redevance carbone en interne au-delà d’une “simple” compensation. L’objectif: responsabiliser les business units pour atteindre la neutralité carbone et sensibiliser les équipes à la question climatique.
Avec Disney, Microsoft est une des rares entreprises à avoir intégré un prix du carbone dans ses activités, grâce à son modèle “carbon fee” (redevance carbone, en anglais). Il a été dévoilé dès 2012 par Tamara Dicaprio, directrice “environmental sustainability” chez Microsoft. L’entreprise a d’ailleurs publié un guide sur le sujet, pour aider les entreprises qui souhaiteraient suivre une telle démarche.
Les deux premières étapes pour internaliser le coût du carbone (fixé entre 6 et 7 dollars la tonne), d’après Microsoft, sont le calcul des émissions de CO2 et la définition d’une politique de réduction des émissions. Alors que le calcul CO2 est une question technique, le choix des objectifs relève de la décision stratégique: faut-il aller jusqu’à la neutralité carbone? Privilégier une réduction en volume absolu ou en valeur relative?
L’entreprise a pour sa part opté pour une politique zéro émission. Cela signifie qu’”elle compense ses émissions de CO2 nettes de 100% grâce à des investissements en efficacité énergétique, en électricité verte et en projets de compensation carbone“. Le périmètre inclut ses opérations directes (datacenters, bureaux et labos R&D), les émissions de ses fournisseurs d’énergie et les déplacements par avion des collaborateurs.
Des fonds d’investissement carbone
Microsoft a mis en place le “carbon fee fund“, un fonds qui finance les investissements dans l’efficacité énergétique, les achats d’énergies renouvelables et de crédits carbone volontaires. Fixé par la direction financière et la direction RSE, son montant dépend des objectifs de réduction de CO2, “du coût moyen de l’énergie renouvelable et des projets de compensation carbone“, précise Microsoft. Le montant est confidentiel, mais Microsoft déclarait avoir acheté 600.000 tonnes de crédits CO2 en 2013 et plus de 3 milliards de kWh en énergies renouvelables, soit l’équivalent de sa consommation d’électricité totale.
C’est la grande originalité des modèles Microsoft et Disney (qui s’est doté d’un dispositif équivalent, le “climate solutions fund”): le carbon fee doit permettre d’ancrer le CO2 dans le pilotage opérationnel de l’entreprise et de créer un “changement de culture chez les salariés”. “Nous affectons les dépenses carbone tous les trimestres aux divisions opérationnelles. Elles doivent alors payer leur part avec leurs propres budgets, via un transfert interne au fonds qui est utilisé pour investir dans les initiatives vertes. Le coût est attribué en fonction des émissions réalisées et prévisionnelles“. Tous les grands postes de coûts sont concernés, y compris les billets d’avion (18% des émissions totales).
Une “taxe CO2” pour engager ses salariés
En 2011, la banque Société Générale a mis en place une “taxe carbone” en interne. Le mécanisme consiste à prélever sur chaque ligne de métier une taxe de 10 euros la tonne de CO2, à hauteur de ses contributions aux émissions CO2 du groupe. Cette taxe est imputée à chaque métier, en étant détaillée par type de dépenses (énergie, déplacements, consommables).
Le mécanisme se différencie de celui de Microsoft sur un point clé: la “cagnotte” sert aussi à financer des initiatives d’efficacité énergétique directement proposées par les salariés. En 2014, 3,2 millions d’euros ont ainsi été dépensés. Pour la Banque, qui a atteint la neutralité carbone (hors financements de projets) dès 2012, il s’agit d’ “engager une culture environnementale en interne“, comme l’expliquait en avril 2014 Emmanuel Martinez, directeur RSE du groupe, dans l’émission “Green business” de BFM.