Malgré la crise, toujours plus de ressources pour les associations de solidarité internationale

Une étude analyse l’évolution des ressources et dépenses des associations de solidarité internationale, entre 2006 et 2011.

Analyser les données financières des associations de solidarité internationale (ASI), pour mieux comprendre leurs contraintes et leurs stratégies. Voilà l’objectif de l’étude “Argent et associations de solidarité internationale, 2006-2011” [pdf], publiée le 4 juin 2015. Celle-ci a été réalisée conjointement par le ministère des Affaires étrangères et du Développement international, l’Agence française de développement (AFD) ainsi que le collectif d’ONG Coordination Sud.

Soixante-quatre associations ont été interrogées. Parmi les plus connues, citons entre autres Amnesty international France, ATD Quart Monde, la Croix-Rouge française, Greenpeace France, le Secours populaire français, Médecins du Monde ou encore Médecins sans frontières.

Ces 64 organisations ont été classées selon leurs activités (urgence, éducation, développement, volontariat…) et selon leur taille: 17 grandes associations dont le budget est supérieur à 10 millions d’euros; 27 associations de taille moyenne, dont le budget est compris entre 1 et 10 millions d’euros; et enfin 20 petites associations dont le budget est intérieur à 1 million d’euros.

Les ASI en 2011: plus d’un milliard d’euros de ressources

Globalement, entre 2006 et 2011, les ressources financières des associations passées au crible ont augmenté de 54%, passant de 686 millions d’euros à 1,06 milliard d’euros. “C’est un secteur en croissance et qui gagne en poids“, se félicite ainsi Philippe Jahshan, président de Coordination Sud.

Si l’on regarde de plus près, on constate tout de même des disparités en fonction des années. Ainsi, l’étude révèle une diminution des ressources entre 2008 et 2009 (-2,5%), au plus fort de la crise économique mondiale. Si on peut légitimement envisager un “effet crise sur la générosité du public, conclut l’étude, cet effet n’a pas de conséquences conjoncturelles suffisamment visibles pour que l’on s’autorise à dire qu’il a joué un rôle central [dans la diminution des ressources, NDLR]”. Entre 2009 et 2010, c’est la situation inverse qui se produit: une forte hausse de 26%, que le rapport explique notamment par l’importante mobilisation du public et des fondations en faveur des victimes du séisme en Haïti.

En 2011, la grande majorité de ces ressources provient du secteur privé (60%, contre 40% de ressources publiques). Elles sont principalement constituées de dons de particuliers (58,2%), auxquels il faut ajouter une part importante de subventions de fondations ou d’entreprises, ainsi que des prestations (41,8% au total). L’étude indique d’ailleurs que “la structure des ressources privées tend à changer, avec une part de moins en moins prépondérante des ressources liées à la générosité du public par rapport aux autres sources de financement privé“.

Reconstruction, santé et aide d’urgence sont les principales dépenses

L’autre élément clé de cette étude concerne l’utilisation de ces ressources financières par les associations. Pour cela, trois critères ont été retenus: les dépenses pour des missions sociales, pour la recherche de fonds, et pour les frais de fonctionnement des organisations.

Entre 2006 et 2011, la courbe des dépenses a suivi invariablement celle de l’augmentation des ressources: 642 millions d’euros de dépenses cumulées en 2006, contre 1,01 milliard cinq ans plus tard. Sans surprise, ce sont les missions sociales qui occupent très largement le premier poste de dépenses (82% en moyennes). Viennent ensuite les frais de fonctionnement (9% en moyenne) et la recherche de fonds (8% en moyenne). Ces dépenses sont principalement réalisées dans les domaines de la reconstruction (20,4% en 2011), de la santé-hygiène-nutrition (18,3%) et de l’aide d’urgence (16,1%). Là encore, il est intéressant de constater une inflexion en 2010, avec davantage de dépenses consacrées aux missions sociales, aux dépens des deux autres secteurs.

Une prédominance du bénévolat et du salariat

En 2011, les effectifs “à temps plein” des 64 ASI représentaient 38.137 personnes: 23.456 salariés, 13.215 bénévoles, 757 volontaires, 444 personnes “mises à disposition” ou “détachées”, et 265 stagiaires. Parmi les salariés, les personnels locaux des pays dans lesquelles les associations interviennent sont les plus représentés.

Les bénévoles forment le gros des troupes au sein des associations étudiées. Ces dernières en ont déclaré près de 120.000 au total (dont 13.215 à temps plein). Chacun fournit, en moyenne, 200 heures de travail chaque année. “Sur la base d’un smic brut à 9 euros de l’heure, ces apports bénévoles en France pourraient être valorisés à près de 210 millions d’euros pour 2011“, précise l’étude.

La question de la frontière (parfois floue) entre travail salarié et travail bénévole a récemment était au cœur de l’actualité. Fin mai 2015, la Croix-Rouge française a été épinglée par l’inspection du travail pour de nombreuses infractions à la législation. Pour notre contributeur Matthieu Hély, sociologue du travail associatif, ces révélations n’ont rien de surprenantes et sont plus répandues qu’on ne le pense.